La Cour d’appel de Paris a rejeté, dans son arrêt du 21 novembre 2024, le recours introduit par Brenntag SE (anciennement Brenntag AG) et sa filiale française Brenntag S.A. (ensemble « Brenntag ») et a ainsi confirmé l’amende de 30 millions d’euros qui avait été prononcée par l’Autorité de la concurrence (l’« Autorité ») à leur encontre le 21 décembre 2017. Cette décision était inédite en ce qu’il s’agissait de la première fois que l’Autorité sanctionnait une entreprise pour obstruction à une enquête.
L’Autorité avait retenu que ces sociétés, opérant dans le commerce de gros de produits chimiques, avaient fait obstruction à l’instruction entamée en raison de pratiques potentiellement constitutives d’une entente verticale et d’un abus de position dominante. Plus précisément, il était reproché à Brenntag, dans le cadre de demandes de renseignements, d’avoir, premièrement, transmis des informations et documents incomplets, imprécis et hors délais et, deuxièmement, d’avoir refusé de communiquer certaines informations demandées. Pendant deux ans, Brenntag s’était notamment abstenue de répondre aux demandes des services d’instruction, excepté pour leur transmettre des estimations intermédiaires sommaires ainsi qu’une liste de fournisseurs. À la suite de ce silence, les services d’instruction ont relancé à multiples reprises Brenntag avec peu de succès, celle-ci refusant de transmettre certains éléments ou communicant des éléments incomplets aux motifs, en autres, que les demandes formulées étaient pour certaines nulles et que la charge de la preuve reposait sur l’Autorité.
Pour rappel, en cas d’entrave par une entreprise à une enquête de concurrence, « notamment en fournissant des renseignements incomplets ou inexacts, ou en communiquant des pièces incomplètes ou dénaturées », l’article L.464-2 V alinéa 2 du code de commerce autorise l’Autorité à prononcer une sanction pécuniaire pouvant atteindre 1% du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes de la société concernée.
La Cour d’appel a confirmé que Brenntag avait commis une pratique d’obstruction. Le « refus expresse, délibéré et définitif » de communiquer des informations ou documents demandés était suffisant pour qualifier une telle pratique, un tel comportement tendant à faire obstacle, de manière délibérée ou par négligence, aux actes d’investigation ou d’instruction.
Ce cas d’espèce n’est pas sans rappeler une décision récente de l’Autorité en date du 24 septembre 2024 par laquelle elle a prononcé une amende de 900 000 euros à l’encontre du groupe Loste pour avoir également obstrué l’enquête conduite par l’Autorité.
En l’espèce, les faits étaient de nature différente puisqu’ils correspondaient à la communication de faux renseignements pendant une opération de visite et saisie (« OVS »). Plus particulièrement, la directrice juridique du groupe Loste avait indiqué aux rapporteurs réalisant l’OVS que le dirigeant du groupe n’était pas présent dans les locaux de l’entreprise alors qu’elle savait que cette information était inexacte puisqu’il s’y trouvait. De plus, le dirigeant du groupe Loste, également vice-président de la Fédération française des industriels charcutiers, traiteurs, transformateurs de viandes (FICT), avait indiqué, au cours de sa conversation téléphonique avec le délégué général de la FICT qui l’avait contacté à la demande des rapporteurs, qu’il se trouvait au Royaume-Uni et non pas à Paris. L’Autorité a considéré qu’une amende lourde était méritée. Dès lors qu’il est demandé aux entreprises une pleine coopération pendant le déroulé des OVS, les comportements en cause ont nécessairement entraîné, selon l’Autorité, un risque de déperdition ou d’altération des preuves, par définition impossible à démontrer.
Ces deux cas d’espèce démontrent l’attachement de l’Autorité à sanctionner lourdement toute obstruction à ses enquêtes afin de créer un effet dissuasif et éviter que d’autres acteurs mettent en œuvre des pratiques similaires qui nuisent à l’efficacité des enquêtes.
Par une décision du 29 octobre 2024, l’Autorité de la concurrence (l’« Autorité ») a infligé une amende de 470 millions d’euros aux fabricants Schneider Electric et Legrand ainsi qu’aux distributeurs Rexel et Sonepar pour avoir mis en place deux ententes verticales sur les prix. Ce type de pratique anticoncurrentielle est considéré d’une particulière gravité par l’Autorité, la gravité des faits étant particulièrement renforcée en l’espèce du fait de leur commission sur un marché concentré, tant à l’amont qu’à l’aval, et en toute connaissance de cause par les entreprises susmentionnées.
A titre informatif, les faits ont été révélés par un signalement du rapporteur général de l’Autorité sur la base d’informations contenues dans un article publié par Mediapart et relatant ces pratiques anticoncurrentielles. A la suite de ce signalement, une information judiciaire a été ouverte par le procureur de la République de Paris. Une procédure pénale est donc en cours en parallèle de la procédure qui a eu lieu devant l’Autorité.
La première entente, mise en place de décembre 2012 à septembre 2018, par Schneider Electric, Rexel et Sonepar, et la seconde, mise en place de mai 2012 à septembre 2015, par Legrand et Rexel, portaient sur des pratiques similaires. En effet, face au constat selon lequel les clients finals (entreprises privées ou collectivités notamment) de matériel électrique de basse tension sollicitent régulièrement des prix inférieurs aux prix d’achat des produits par les distributeurs, un système dit de « dérogation » a été mis en place. En pratique, une remise sur le prix d’achat standard était octroyée aux distributeurs afin qu’ils accordent à leurs clients des prix plus bas et correspondant à leurs demandes. Une telle pratique a été bénéfique à la fois aux fabricants et aux distributeurs puisque les fabricants ont ainsi pu contrôler le prix de revente aux clients finals et les distributeurs ont pu garantir leur marge et ne pas revendre à perte. Si le fait de solliciter des remises spécifiques pour des clients finals n’était pas, par nature, illicite lorsque le nouveau prix d’achat obtenu par le distributeur est suffisamment bas pour lui permettre de consentir lui-même, s’il le souhaite, une réduction supplémentaire au client final, l’Autorité a considéré dans l’affaire en cause que les prix présentés par les fabricants comme maximums ou conseillés étaient, en pratique, fixes, ce qui est interdit.
En définitive, l’Autorité affirme dans son communiqué de presse relatif à la décision que « le système de dérogations avait pour finalité de maintenir des prix standards élevés en France en limitant, notamment, la concurrence intra-marque, au détriment des clients finals. »
Il est à noter qu’un recours a été formé devant la Cour d’Appel de Paris, affaire à suivre donc …
Le 8 février 2024, l’Autorité de la concurrence (l’ « Autorité ») s’est saisie d’office afin d’évaluer les enjeux concurrentiels liés aux systèmes de notation visant à informer les consommateurs sur les caractéristiques liées au développement durable des produits et des services de consommation. En effet, de plus en plus de marques utilisent un système de code composé de chiffres, de lettres et/ou de couleurs dont l’objectif est de renseigner les consommateurs de manière simple et didactique sur les caractéristiques de durabilité des produits et services offerts en France notamment.
C’est dans ce contexte et après avoir interrogé de multiples acteurs du secteur mais aussi des associations de défense des consommateurs notamment que l’Autorité a publié, près d’un an après sa saisine, un avis relatif auxdits systèmes dès lors qu’ils peuvent soulever des préoccupations concurrentielles.
Ledit avis mentionne notamment que l’éditeur d’un système de notation doit être transparent sur ses modalités de mise en place et veiller à sa fiabilité dès lors qu’il influe sur un paramètre de concurrence et peut jouer un rôle important pour les consommateurs dans la comparaison des produits et services.
En outre, l’Autorité rappelle que la mise en place d’un système de notation ne doit pas représenter l’occasion pour les opérateurs de commettre un dénigrement (en attribuant une mauvaise note à un produit contenant une certaine substance alors que son utilisation est autorisée) ou encore une pratique anticoncurrentielle (tels que l’échange d’informations commerciales sensibles entre concurrents ou une entente entre concurrents selon laquelle ils ne se feront pas concurrence sur la performance de leurs produits/services liée au développement durable en s’abstenant de communiquer sur les moins bonnes notes).
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