Nous vous invitons ce mois-ci en Italie, où l’autorité de concurrence a proposé un nouveau régime de transaction dans le cadre des procédures antitrust.
Dans sa proposition du 22 mars 2021, adressée à la présidence du Conseil des ministres pour la loi annuelle sur la concurrence, l'Autorité italienne de la concurrence ("AIC") a suggéré la mise en place d’un régime de transaction dans le cadre des procédures antitrust.
Contrairement à d’autres États membres, l’Italie ne dispose pas à ce jour d’une procédure de transaction.
Le nouveau régime envisagé cherche à s'aligner sur la procédure de transaction de l'UE introduite en 2008 par la Communication de la Commission européenne relative aux procédures de transaction, et qui a été largement utilisée (35 des 58 affaires d'entente ont été réglées grâce à cet outil depuis son introduction en 2010).
Dans le cadre d’une transaction avec la Commission européenne, les parties bénéficient d'une procédure accélérée et se voient garantir une réduction d’amende de 10% en échange (i) de la reconnaissance de leur responsabilité dans l'infraction présumée au droit de la concurrence et (ii) de la renonciation à certains droits procéduraux (notamment le plein accès au dossier et le droit à une audition).
En comparaison avec la procédure de transaction de l’UE, les propositions de l'AIC :
Le régime italien envisagé est aligné sur la procédure de transaction de l’UE, à savoir :
L’AIC peut interrompre les discussions de transaction à l'égard de toutes les parties ou de certaines d'entre elles, à tout moment au cours de la procédure de transaction, si elle estime que l'efficacité de la procédure a été compromise, permettant ainsi de recourir à une procédure hybride (c'est-à-dire lorsque toutes les parties à la procédure ne s'engagent pas dans une transaction).
La recommandation de l'AIC ne prend pas encore la forme d’une proposition de loi, et aucune déclaration officielle n'a été publiée à cet égard par le législateur italien.
La proposition de l'AIC nécessiterait un nouveau texte modifiant la loi antitrust italienne et des décrets d'application visant à préciser davantage les étapes procédurales de ce nouvel outil.
Si elle est approuvée, cette proposition élargira les pouvoirs de l'autorité de concurrence italienne en ce qui concerne les infractions aux articles 101 et 102 du TFUE (et leurs équivalents nationaux), contribuant ainsi à l'efficacité de l'application de la législation antitrust et garantissant la cohérence de l'application des procédures de transaction italiennes et communautaires ; ceci en comparaison avec la fragmentation que l'on peut observer au niveau de l'UE, où les règlements des ententes sont régis par le « 2008 Settlements Package ».
Il est difficile de prévoir l'impact de ce nouvel outil sur l'application du droit italien de la concurrence puisque l'AIC s'est jusqu'à présent largement appuyé sur les décisions d'engagement, permettant de mettre fin aux procédures sans constatation d'une infraction. La question de l’interaction entre le régime des engagements et le régime envisagé des transactions reste aujourd’hui ouverte.
L'expérience acquise au niveau de l'UE indique que le succès de ce nouvel outil dépendra du degré de sécurité juridique entourant son application et de l'identification de garanties procédurales appropriées pour les parties concernées, notamment parce que la reconnaissance de la « participation et de la responsabilité à l'infraction » a inévitablement un impact sur les actions en dommage qui s'ensuivent, lesquelles se multiplient en Italie comme dans le reste de l'UE.
Dans le cadre de la vente de ses produits cosmétiques à ses distributeurs appartenant au réseau de distribution sélective qu’elle a mis en place, Caudalie s’est vue reprocher par l’Autorité belge de la concurrence d’avoir imposé des prix minimums de revente à ses distributeurs via la fixation d’un niveau maximum de ristourne. En pratique, Caudalie exigeait de ses distributeurs qu’ils appliquent, sur le prix recommandé, une ristourne maximale comprise entre 5 et 15%.
Pour s’assurer du respect par ses distributeurs des prix recommandés, Caudalie a mis en place, selon l’Autorité belge, un réseau de surveillance interne : courriers de rappel à l’ordre, menaces de cessation pure et simple de la relation commerciale et blocage des commandes lorsque ceux-ci refusaient d’obtempérer. Certains distributeurs participaient eux-mêmes au contrôle des prix pratiqués par les autres membres du réseau.
En parallèle, Caudalie a également été condamnée pour avoir limité les ventes passives et actives de ses distributeurs. Deux mécanismes étaient ici visés : d’une part, l’interdiction faite aux distributeurs établis dans un Etat membre d’appliquer, dans un autre Etat membre, des prix plus bas que les prix minimums imposés dans cet Etat membre. Et d’autre part, l’interdiction faite aux distributeurs d’un Etat membre présents en ligne, de vendre dans un Etat membre différent de celui dans lequel ils étaient établis. Certains documents permettaient en effet d’établir que les distributeurs sélectifs ne pouvaient livrer que dans le pays dans lequel était logé le site, sauf accord de Caudalie. Pour deux de ces distributeurs, Farmaline et Newpharma, cela s’est traduit, soit par un ordre de cesser la fourniture des produits Caudalie dans d’autres pays que la Belgique, soit par le respect des tarifs nationaux appliqués sur les sites internet hébergés dans d’autres Etats membres.
Le Collège de la concurrence a donc condamné Caudalie à hauteur de 859 310 euros pour ces pratiques mises en œuvre entre novembre 2014 et janvier 2018 et a accepté les engagements proposés par Caudalie (communication aux distributeurs sur leur liberté tarifaire et communication aux distributeurs sur les mesures pouvant être prises par Caudalie pour préserver son réseau, son image de marque et assurer un service de qualité aux consommateurs sans restreindre les ventes au sein de l’UE).
Il est regrettable que l’Autorité belge n’ait pas souhaité engager le débat sur la légitimité d’une marque de limiter des remises massives dans le cadre de réseaux sélectifs pouvant nuire à l’image de la marque. Débat qui devrait avoir lieu à l’occasion de la réforme des règles de l’UE sur les accords verticaux.
L’opération portait sur le rachat de la société Pipeline Méditerranée-Rhône (ci-après « SPMR ») par le groupe Ardian, et donc sur la prise de contrôle par le groupe Ardian de l’oléoduc Pipeline Méditerranée-Rhône (ci-après « PMR »), un réseau de canalisations approvisionnant des dépôts du sud-est de la France en produits raffinés.
A l’issue de l’opération, Ardian serait devenu l’actionnaire principal de la SPMR, aujourd’hui contrôlée par cinq opérateurs. Le groupe aurait ainsi pu décider à lui seul de la politique commerciale et tarifaire du PMR.
De plus, l’Autorité a jugé que le PMR était une infrastructure essentielle, se trouvant par conséquent dans une position de monopole qui ne pourrait être remise en question par un quelconque concurrent en raison des investissements importants ayant été nécessaires pour la construction de cet oléoduc.
Autre élément bloquant, l’insuffisance du contrôle de l’Etat pour faire face au pouvoir de marché d’Ardian post-opération sur le marché du transport de produits pétroliers raffinés par oléoducs dans le sud de la France. En effet, l’Autorité a jugé que bien que le gouvernement puisse exercer un certain contrôle sur la SPMR à travers sa politique en matière énergétique et le principe de continuité d’approvisionnement en produits pétroliers du territoire français, cela n’aurait pas suffi à écarter le risque d’atteinte à la concurrence.
Les engagements proposés par le groupe Ardian ont été rejetés par l’Autorité. L’Autorité a également considéré que la société Ardian n’avait pas démontré suffisamment les gains d’efficience pouvant compenser et/ou écarter les risques exposés plus haut. Par décision du 12 mai 2021, l’Autorité a donc interdit l’opération projetée.
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